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Jane Austen - Sanditon


Jean-Claude Lattès, 1997

Traduction de Laurent Bury



Quatrième de couverture

En ce début du XIXe siècle où la bonne société anglaise découvre les bienfaits des bains de mer, les Parker se sont mis en tête de faire de la paisible bourgade de Sanditon une station balnéaire à la mode. Invitée dans leur magnifique villa, la jeune Charlotte Heywood va découvrir un monde où, en dépit des apparences « très comme il faut », se déchaînent les intrigues et les passions. Autour de la tyrannique lady Denham et de sa pupille Clara gravitent les demoiselles Beaufort, le ténébreux Henry Brudenall et l’étincelant Sidney Parker, peut-être le véritable meneur de jeu d’une folle ronde des sentiments. Observatrice avisée, Charlotte saura-t-elle demeurer spectatrice ? Le cœur ne va-t-il pas bouleverser les plans de sa raison ?

À sa mort en 1817, Jane Austen laissait cette œuvre inachevée. Une romancière d’aujourd’hui a relevé le défi de lui donner un prolongement. Un exercice mené à bien dans la plus remarquable fidélité, avec autant de tact que de brio.


L’histoire

Jane Austen n’écrivit que les 11 premiers chapitres de Sanditon, ce qui constitue l’introduction du livre. Elle y présente les personnages et les circonstances qui créeront l’environnement propice à une intrigue dont elle seule a gardé le secret. Comment savoir quels développements elle aurait imaginés si elle n’était pas tombée malade ? Même avec une excellente connaissance de son œuvre, des techniques qu’elle employait habituellement dans ses romans, de son style et de ce qui constitue le sel de ses textes, cela reste très difficile à augurer. Ce roman a ainsi connu plusieurs tentatives d’achèvement avec différents succès. La version que j’ai lue est celle proposée par Marie Dobbs, écrivaine plébiscitée pour ses talents de « continuatrice », et qui reste la plus unanimement reconnue par le public. Elle ajoute 19 chapitres pour tenter de créer l’histoire austenienne de Charlotte.

À Sanditon, une petite société hétéroclite se trouve réunie pour la saison des bains de mer. Marie Dobbs imagine les intrigues amoureuses mais aussi amicales ou plus intéressées qui se lient entre les personnages développés par Jane Austen. Le récit reste assez fidèle à ce qu’aurait pu être celui de l’auteure jusqu’à une scène finale assez rocambolesque pour faire froncer les sourcils des amateurs du genre, finalement l’unique véritable défaut dans la trame du roman, tout le reste se révélant très acceptable. Une fois le livre refermé, on admet avoir passé un bon moment et presqu’oublié la dualité de ton.


Le style

Bien entendu, les premiers chapitres sont entièrement fidèles au style de Jane Austen même si l’on devine qu’il s’agit d’un premier jet, non retravaillé. Certains épisodes semblent un peu trop rapidement narrés et l’auteur paraît un peu vite dévoiler certaines intentions. Néanmoins, on peut imaginer que la romancière, déjà fort aguerrie, n’ait fait là que tracer la trame d’un futur roman qu’elle aurait étoffé. On ne peut alors qu’admirer la vivacité, la précision et la patine du style pour une version préliminaire.

Marie Dobbs se montre une remarquable « continuatrice ». On sent qu’elle connaît particulièrement bien le style austenien et a une vision assez nette du déroulement des intrigues de ses romans pour tracer celui-ci tel qu’il aurait pu être. On note à peine le changement de plume et on lit le roman comme s’il s’agissait de celui écrit par l’auteure initiale. Des tournures de phrases un peu moins travaillées, une focalisation sur l’action au détriment de certaines scènes où « il ne se passe rien » si importantes dans la narration de Jane Austen ne gênent guère même si elles restent réelles. A posteriori, on pourra regretter un manque de cynisme, d’humour et de ce féminisme fait de bon sens qui resteront l’apanage de Jane Austen.


L’édition

Même chez Livre de poche, cette édition apparaît comme très soignée. La couverture en pelliculage velours donne un aspect luxueux. La police de caractère employée, extrêmement élégante, rappelle celles des ouvrages anciens. Et on appréciera la note de la continuatrice en fin d’ouvrage même si j’ai déploré qu’elle ne soit pas nommée et d’avoir dû faire des recherches pour en savoir plus.


Mon avis

Je reste assez mitigée vis-à-vis de ce texte. Il est certes écrit dans l’esprit austenien et on ne peut guère lui faire de reproches mis à part concernant la scène échevelée imaginée en fin de roman, qui semble un non-sens dans l’univers de cette immense romancière. On se laisse émouvoir par les diverses histoires qui se nouent et plus particulièrement par celle de l’héroïne principale. Toutefois, il ne suffit pas d'une belle histoire d'amour pour faire un roman de Jane Austen. Si tel était le cas, elle aurait été parfaitement imitée depuis longtemps, mais son univers va bien plus loin que ces simples considérations romantiques. Mon sentiment final a donc été de regretter le piquant que Marie Dobbs n’a pas su apporter sans parvenir à lui en vouloir : la tâche était certainement insurmontable et elle est tout de même parvenue à faire de cette ébauche de roman un texte tout à fait agréable à découvrir.

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